Poesia

Víctor Hugo: La conciencia

noviembre 14, 2024


El pensamiento no es otra cosa que un simple soplo. Pero un soplo que hace estremecer al mundo.
VH

«La conciencia»

Furiosa tempestad se desataba
cuando, de pieles rústicas vestido,
Caín con su familia caminaba
huyendo a la justicia de Jehovah.
La noche iba a caer. Lenta la marcha
al pie de una colina detuvieron,
y a aquel hombre fatídico dijeron
sus tristes hijos: -descansemos ya.

Duermen todos excepto el fratricida
que, alzando su mirada sobre el monte,
vio en el fondo del fúnebre horizonte
un ojo fijo en él.
Se estremeció Caín, y despertando
a su familia del dormir reacio,
cual siniestros fantasmas del espacio
retornaron a huir. ¡Suerte cruel!

Corrieron treinta noches y sus días,
y pálido, callado, sin reposo,
y mirando sin ver, y pavoroso,
tierra de Assur pisó.
─Reposemos aquí. Dénos asilo
esta región espléndida del suelo─
Y, al sentarse, la frente elevó al cielo…
y allí el ojo encontró.

Entonces a Jubal, padre de aquellos
que en el desierto habitan ─haz, le dijo,
que ese arme aquí una tienda─ y el buen hijo
armó tienda común.
─¿Todavía lo veis? -preguntó Ysila,
la niña de la blonda cabellera,
la de faz como el alba placentera,
y Caín respondió: ─¡lo veo aún!

Jubal entonces dijo: ─una barrera
de bronce construiré: tras de su muro,
padre, estarás de la visión seguro;
ten confianza en mí.

Una muralla se elevó altanera…
y el ojo estaba allí.
Tubalcaín a edificar se puso
una ciudad asombro de la tierra,
en tanto sus hermanos daban guerra
a la tribu de Seth y á la de Enós.
De tinieblas poblando la campiña
la sombra de los muros se extendía,
y en ellos la blasfemia se leía:
PROHIBO ENTRAR A DIOS.-

Un castillo de piedra, formidable,
que a la altitud de una montaña asciende,
de la ciudad en medio se desprende,
y allí Caín entró.
Ysila llega hasta él, y cariñosa,
Padre, le dice, ¿aún no ha desaparecido?─
Y el anciano, aterrado y conmovido,
la responde: ─¡No! ¡no!

Desde hoy quiero habitar bajo la tierra
como en su tumba el muerto. ─Y presurosa
la familia cavóle una ancha fosa,
y a ella descendió al fin.
Mas debajo esa bóveda sombría,
debajo de esa tumba inhabitable,
el ojo estaba fiero, inexorable…
¡y miraba á Caín!

Víctor Hugo

Traducción de Ricardo Palma

Poema original en francés:

«La conscience»

Lorsque avec ses enfants vêtus de peaux de bêtes,
Echevelé, livide au milieu des tempêtes,
Caïn se fut enfui de devant Jéhovah,
Comme le soir tombait, l’homme sombre arriva
Au bas d’une montagne en une grande plaine ;
Sa femme fatiguée et ses fils hors d’haleine
Lui dirent : « Couchons-nous sur la terre, et dormons. »
Caïn, ne dormant pas, songeait au pied des monts.
Ayant levé la tête, au fond des cieux funèbres,
Il vit un oeil, tout grand ouvert dans les ténèbres,
Et qui le regardait dans l’ombre fixement.
« Je suis trop près », dit-il avec un tremblement.
Il réveilla ses fils dormant, sa femme lasse,
Et se remit à fuir sinistre dans l’espace.
Il marcha trente jours, il marcha trente nuits.
Il allait, muet, pâle et frémissant aux bruits,
Furtif, sans regarder derrière lui, sans trêve,
Sans repos, sans sommeil; il atteignit la grève
Des mers dans le pays qui fut depuis Assur.
« Arrêtons-nous, dit-il, car cet asile est sûr.
Restons-y. Nous avons du monde atteint les bornes. »
Et, comme il s’asseyait, il vit dans les cieux mornes
L’oeil à la même place au fond de l’horizon.
Alors il tressaillit en proie au noir frisson.
« Cachez-moi ! » cria-t-il; et, le doigt sur la bouche,
Tous ses fils regardaient trembler l’aïeul farouche.
Caïn dit à Jabel, père de ceux qui vont
Sous des tentes de poil dans le désert profond :
« Etends de ce côté la toile de la tente. »
Et l’on développa la muraille flottante ;
Et, quand on l’eut fixée avec des poids de plomb :
« Vous ne voyez plus rien ? » dit Tsilla, l’enfant blond,
La fille de ses Fils, douce comme l’aurore ;
Et Caïn répondit : « je vois cet oeil encore ! »
Jubal, père de ceux qui passent dans les bourgs
Soufflant dans des clairons et frappant des tambours,
Cria : « je saurai bien construire une barrière. »
Il fit un mur de bronze et mit Caïn derrière.
Et Caïn dit « Cet oeil me regarde toujours! »
Hénoch dit : « Il faut faire une enceinte de tours
Si terrible, que rien ne puisse approcher d’elle.
Bâtissons une ville avec sa citadelle,
Bâtissons une ville, et nous la fermerons. »
Alors Tubalcaïn, père des forgerons,
Construisit une ville énorme et surhumaine.
Pendant qu’il travaillait, ses frères, dans la plaine,
Chassaient les fils d’Enos et les enfants de Seth ;
Et l’on crevait les yeux à quiconque passait ;
Et, le soir, on lançait des flèches aux étoiles.
Le granit remplaça la tente aux murs de toiles,
On lia chaque bloc avec des noeuds de fer,
Et la ville semblait une ville d’enfer ;
L’ombre des tours faisait la nuit dans les campagnes ;
Ils donnèrent aux murs l’épaisseur des montagnes ;
Sur la porte on grava : « Défense à Dieu d’entrer. »
Quand ils eurent fini de clore et de murer,
On mit l’aïeul au centre en une tour de pierre ;
Et lui restait lugubre et hagard. « Ô mon père !
L’oeil a-t-il disparu ? » dit en tremblant Tsilla.
Et Caïn répondit : » Non, il est toujours là. »
Alors il dit: « je veux habiter sous la terre
Comme dans son sépulcre un homme solitaire ;
Rien ne me verra plus, je ne verrai plus rien. »
On fit donc une fosse, et Caïn dit « C’est bien ! »
Puis il descendit seul sous cette voûte sombre.
Quand il se fut assis sur sa chaise dans l’ombre
Et qu’on eut sur son front fermé le souterrain,
L’oeil était dans la tombe et regardait Caïn.

Víctor Hugo

Víctor Marie Hugo nació en Besanzón, Francia, el 26 de febrero de 1802.
Poeta, dramaturgo y escritor romántico, está considerado como uno de los escritores más importantes en lengua francesa.
Fue un incansable activista en lucha social, denunciando hasta el fin de su vida la segregación social.
La que está considerada como su obra maestra, Los Miserables, es todo un himno en contra de la miseria y en favor de los más desposeídos; luchó ferozmente contra la pena de muerte, y para defender su abolición utilizó todas las tribunas y todos los medios a su alcance. En su discurso del 15 de septiembre de 1848 ante de la Asamblea Nacional Constituyente dijo: La pena de muerte es el signo especial y eterno de la barbarie. (La peine de mort est le signe spécial et éternel de la barbarie.)
En la última reunión que presidió, manifestó ante el público: La cuestión social sigue en pie. Es terrible, pero simple, ¡es la cuestión de los que tienen y los que no tienen!”. Dicha reunión tenía como fin recaudar fondos para permitirles a 126 delegados obreros poder ir al primer Congreso socialista de Francia, en Marsella.
Murió en París, el 22 de mayo de 1885.

También de Viíctor Hugo en este blog:

«Víctor Hugo: Necedad de la guerra»: AQUÍ

«Victor Hugo: La tumba y la rosa»: AQUÍ

«Victor Hugo: Época de siembra»: AQUÍ

«Victor Hugo: Los insultadores»: AQUÍ

«Victor Hugo: Mañana, al alba…»: AQUÍ

«Victor Hugo: Libertad, igualdad, fraternidad»: AQUÍ

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